Infirmière de formation, je suis particulièrement sensible aux observations liées á la santé des personnes sans domicile fixe. Il peut être extrêmement difficile pour les sans-abris d’aller chez un médecin, d’acheter et de prendre correctement des médicaments, de soigner des blessures, de manger sainement et de boire suffisamment ou de dormir paisiblement. Beaucoup de personnes en situation de précarité passent par différentes institutions et un suivi de la prise en charge de ces personnes n’est pas toujours garanti.
Au Luxembourg, des services mobiles existent qui assurent des soins infirmiers et médicaux aux personnes ayant un domicile fixe et une assurance maladie. Or, cela n’est pas le cas pour les sans-abris, qui souvent ne disposent pas d’une telle assurance.
Ainsi, en coordination avec les institutions compétentes dans le domaine de la santé ou actives dans le secteur, nous avons lancé ce service de soins flexible et interinstitutionnel pour les personnes sans abri.
Depuis novembre 2020, trois infirmiers.ères sont sur le terrain et cherchent le contact avec des personnes dans la rue ou dans les structures pour sans-abri et leur proposent une assistance et un soutien pour toutes les questions relatives à leur santé.
Dans ce travail, l’entrée en contact avec les personnes dans le besoin est toujours difficile. Ces moments nous rappellent à quel point il est important d’atteindre tout le monde. Une fois cette relation de confiance établie, nous constatons que les gens peuvent être aidés, et que leurs problèmes de santé sont pris en compte, ce qui nous motive davantage.
Ne laissons pas le sans-abrisme être une fatalité
Stéphanie Sorvillo, Caritas
Trois de nos bénéficiaires ont déjà pu intégrer un hébergement et ce fût un moment particulièrement fort quand ils nous ont fait savoir que pour eux, l’élément clé de cet accomplissement était dû à l’intensité et la continuité de notre accompagnement.
Petit à petit, nous avons également établi une bonne coopération avec d’autres organisations d’aide et nos bénéficiaires commencent à comprendre notre rôle sur le terrain.
Au cours des derniers mois, un réel besoin s’est fait ressentir. Avec la pandémie, les problématiques d’accès au logement et au système de santé deviennent de plus en plus urgentes et continuent à creuser les inégalités.
L’information et la sensibilisation au sujet du Covid-19 représente un défi supplémentaire. Mais nous avons également pu constater que les personnes vivantes dans l’exclusion liée au logement se montrent heureuses d’être informées et les explications sur la pandémie peuvent aussi être un moyen d’entrer en contact, un début d’une conversation qui peut ensuite mener bien plus loin…
De l’autre côté, le contact avec les patients sans-abri dans les cliniques, mais aussi avec les employés des institutions de soins de santé est plus difficile et nécessite plus de temps et d’organisation qu’en dehors du contexte pandémique.
En raison des contacts réduits et du temps supplémentaire nécessité nous avons dû, dans un premier temps, réduire le nombre de nos suivis. Avec la fermeture de l’horeca, s’installer dans un café pour mener des entretiens personnels n’était plus possible. Nous avons donc dû réserver des plages horaires dans certaines institutions ou faire des promenades avec les bénéficiaires, lors desquelles nous parlions de leur situation.
Les inégalités dans le domaine de la santé sont présentes et souvent sous-estimées au Luxembourg. En 1978, l’OMS a fait de la santé un droit humain fondamental dans la déclaration d’Alma-Ata, dont nous appliquons les principes. À travers nos actions, nous espérons contribuer à la prévention et la sensibilisation de certaines pathologies et créer un accès aux soins de santé pour tous.
Les personnes qui vivent dans le sans-abrisme se trouvent dans cette situation en raison de problèmes complexes et difficiles. Elles doivent être accompagnées en fonction de leurs besoins individuels, soutenues à hauteur de vue et traitées avec respect et dans un cadre propice.
La création d’une relation de confiance et d’un lien sécurisant, dans tous les sens du terme est primordiale dans l’accompagnement de ces personnes vulnérables. Ne laissons pas le sans-abrisme être une fatalité, c’est une situation passagère qui est liée au passé de nos bénéficiaires, mais qui ne doit pas définir leur futur.